En vue du lancement du web-documentaire Jazz Petite-Bourgogne en juin, cette
série d'entrevues expose la vision de créateurs du projet, en plus de partager
l'enthousiasme d'acteurs de la scène musicale et du domaine des médias.
Entretien jazzé avec Robin Bruneau, propriétaire du club de jazz montréalais Dièse
Onze.
Dièse Onze |
Quels styles de jazz peut-on entendre au Dièse
Onze?
On y accueille vraiment des musiciens de tous les styles, que ce
soit de jazz manouche, de Dixieland et d'influences new-yorkaises. Il y a, à
Montréal, beaucoup de très très bons musiciens, si on compare avec l'Europe ou
même New York. Et des petits lieux de spectacle comme le Dièse Onze (il y
en a d'autres aussi) leur permettent de se produire. Car la mission du Dièse,
c'est de faire jouer les musiciens qui ne jouent pas assez. Il peut s'agir de
musiciens chevronnés comme Yannick Rieu qui joue du jazz depuis plus de 30 ans
et qui s'y produit deux fois par mois. Ou encore, tous les mardis, d'un combo
de jazz de l'Université de Montréal : de jeunes étudiants que l'on place
en situation de concert devant une vraie clientèle.
Qu'est-ce qui caractérise la scène musicale
montréalaise actuelle?
Beaucoup de musiciens passent leur baccalauréat à Montréal et vont
par la suite se perfectionner à New York. On sent donc une forte influence
new-yorkaise chez les plus jeunes. Et j'y reviens, mais ce qui caractérise la
scène montréalaise, c'est l'abondance de musiciens qu'on y trouve. Il y a très
peu de villes en Europe, par exemple, qui comptent quatre universités qui
offrent une formation de jazz jusqu'à la maîtrise. Montréal est une remarquable
pépinière de musiciens.
Robin Bruneau |
Dans les années 1940, les cabarets du quartier La
Petite-Bourgogne ont vu défiler de grands jazzmen. Y a-t-il des musiciens de
renoms qui sont produits plus récemment au Dièse Onze?
De temps
à autre, je fais venir des musiciens qui sont plus connus. Dernièrement, on a
reçu Marc Copland. Et on a déjà eu David Binney, un saxophoniste assez en vogue
à New York. Cependant, il ne s'agit pas de la mission du Dièse Onze que
d'aller chercher de grands noms. Il existe d'autres clubs qui travaillent avec
des musiciens internationaux, comme l'Upstairs. Comme on trouve déjà à Montréal une abondance de musiciens de
talent, il me semble essentiel de faire d'abord travailler ceux-ci. Néanmoins,
bon nombre de ceux qui passent au Dièse ont une réputation qui dépasse nos
frontières. Je pense à François Bourassa, à Jean-Pierre Zanella ou encore à
Yannick Rieu que j'ai nommé plus tôt. Ces musiciens font des tournées
internationales en Europe, jusqu'en Chine... On connaît souvent bien mal les
artistes d'ici.
Le jazz a connu ses heures de gloire à Montréal
dans les années 1940. Croyez-vous que sa popularité est aujourd'hui en baisse?
Je crois que le jazz ne se démodera jamais, un peu comme la
musique classique. Toutefois, il est nécessaire de faire des efforts pour
recréer l'effervescence d'autrefois. Je suis de ceux qui pensent qu'il faut
qu'il y ait plus de clubs de jazz, car je crois que c'est l'offre qui va créer
la demande.
Avez-vous l'impression que certains musiciens
vivent de nostalgie en retournant à d'anciens styles, au swing par exemple?
Il est vrai que le swing est un courant très à la mode – on fait même maintenant de l’électro-swing.
Mais pour la plupart des musiciens, ces projets musicaux sont plus
« alimentaires » que personnels. Ce courant nostalgique provient
plutôt d'un mouvement populaire. Je crois au contraire que la majorité des
musiciens ont une vision très moderne du jazz : une musique qui a
énormément évolué avec le temps et avec son temps.
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